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Crises sanitaires et Smart City : jusqu’où iront les outils numériques ?

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Le recours massif aux outils numériques est-il nécessaire pour faire face aux crises sanitaires dans la Smart City ? Alors que les villes intelligentes du monde entier ont subi de plein fouet et subissent encore les répercussions de la crise de la Covid-19, leurs failles ont été révélées et exploitées. Avec elles, la nécessité d’évoluer différemment et d’anticiper les crises à venir pour faire face de manière optimale. Conscient des enjeux de la ville de demain, trois sénateurs ont récemment publié un rapport intitulé « Crises sanitaires et outils numériques ». Dans ce dernier, la délégation du Sénat affirme que les outils numériques doivent impérativement occuper une place beaucoup plus importante dans les villes, même s’ils doivent devenir intrusifs. Zoom sur la situation et explications de ces propos qui ont pu heurter et choquer lors de leur publication.

Pourquoi le Sénat met les outils numériques en avant dans la Smart City ?

Revenons dans un premier temps sur les écrits du Sénat dans son rapport pour poser le contexte. Dans ce rapport intitulé « Crises sanitaires et outils numériques », le Sénat donne des recommandations claires bien qu’un peu brutes à première vue. Les outils numériques doivent ainsi occuper une place majeure dans la gestion des crises sanitaires dans les villes intelligentes, « en assumant si nécessaire des mesures plus intrusives, mais aussi plus ciblées et limitées dans le temps », « avec en contrepartie, une liberté plus vite retrouvée. » Le Sénat demande également « un accès facilité à certaines données » qui « aurait permis aux collectivités locales de mieux cibler leurs actions. » Avant d’ajouter ces propos qui à lecture initiale peuvent heurter « il n’y a pas de mystère : plus ils [les outils numériques] sont intrusifs, plus ils sont efficaces. »


Tout au long des 184 pages publiées, le rapport de la délégation du Sénat liste les nombreuses stratégies numériques mises en place aux quatre coins du monde, revenant régulièrement sur le cas de l’Estonie qu’il présente comme l’une des administrations numériques les plus évoluées de la planète.


Le document est beaucoup plus sévère avec la France qui, selon le Sénat, a tangué entre « les impréparations et les contradictions. » « Par contraste avec la stratégie des pays asiatiques et le volontarisme de certains de ses partenaires européens ou occidentaux [...], la France apparaît très en retrait dans son usage, par les pouvoirs publics, des outils numériques dans la gestion de la pandémie de Covid-19 », écrivent les co-auteurs du rapport et sénateurs Véronique Guillotin, Christine Lavarde et René-Paul Savary. Et les trois personnalités analysent les possibles conséquences néfastes de cette stratégie numérique insuffisante et notamment un « décalage extrêmement préoccupant, non seulement dans le cadre de la pandémie actuelle […], mais aussi et surtout dans la perspective des épidémies à venir. »

Comment utiliser les outils numériques pour répondre aux crises sanitaires à venir dans la Smart City ?

Après le constat et l’analyse, après le listing des stratégies déjà adoptées dans les autres pays du monde, place aux possibilités offertes pour améliorer la gestion des crises sanitaires dans les villes intelligentes françaises. Les auteurs du rapport posent alors leurs questions ouvertes avant de proposer des solutions, des interrogations qui visent à « répondre à une crise avec toute l'efficacité du numérique sans rien céder sur nos valeurs ». Mais comment ? Grâce à deux principes fondamentaux à savoir « la proportionnalité des mesures » et « leur individualisation ». Voyons plus en détails à quoi font référence ces deux principes.


Le premier, celui de la proportionnalité des mesures est illustré par un exemple marquant dans le rapport à savoir : « face à une menace un peu plus grave, on pourrait imaginer l’envoi automatique d’un SMS à tout individu qui s’éloignerait de son domicile pendant le couvre-feu, à simple titre de rappel et sans aucune remontée d’information » voire "dans les cas les plus extrêmes, des mesures plus fortes […]comme une « violation de quarantaine qui pourrait conduire à une information en temps réel des forces de l’ordre, à une désactivation du titre de transport, ou encore à une amende prélevée automatiquement sur son compte bancaire », comme le font, du reste, les radars routiers temporise le rapport.


Relativement à l’individualisation, une quarantaine pourrait être imposée aux personnes positives. Leur contrôle serait alors effectué via une géolocalisation en temps réel. Et en cas d’infraction, les autorités seraient alertées et une sanction automatiquement donnée.

Quid de la collecte des données dans la ville intelligente, « une sensibilité française »

Pour les sénateurs rédacteurs du rapport, il y a en France une peur marquée face à la collecte des données, collecte qui est rapprochée d’un « État policier et d’un fichage de la population. » Une idée qui a la vie dure et qui est brandie chaque fois que le gouvernement, qu’un gouvernement, s’ose sur l’hasardeuse question de la collecte des données, qu’elle concerne le fichier des titres électroniques sécurisés ou encore les éléments répertoriés dans les dossiers médicaux ou, depuis peu, dans les fichiers de TousAntiCovid.


Alors même si cette « sensibilité française » est « ancienne et profonde, et qu’elle n’est pas dénuée de toute justification historique », faut-il se diriger vers un numéro unique d’identification, après avoir opté pour France Connect ? Pour les sénateurs « la France, contrairement à d’autres pays, s’est toujours refusée à franchir le pas décisif ».


Et c’est cette même « sensibilité française » qui amène à l’absence (dommageable on le comprend dans le rapport), de numéro unique d’identification en France. Notons tout de même les récentes évolutions proposées par le service France Connect précité. Depuis 2014, il autorise l’accès à 700 services en ligne pour plus de 20 millions d’utilisateurs avec un seul et même identifiant. Cette année 2021 a également vu la mise en place de la nouvelle version de la carte d’identité, à savoir la eCNI qui assure « un niveau de sécurité inédit, notamment grâce aux données biométriques et pourrait être le support d’une future identité électronique » même s’il « reste encore à franchir le pas décisif, celui d’une identité numérique universelle et obligatoire, qui aurait, comme en Estonie et dans d’autres pays, pu se révéler précieuse face à la crise ».

Le rôle des collectivités dans la gestion des crises sanitaires

Là encore, pour la gestion de la récente crise sanitaire, le rapport des sénateurs dénonce un accès difficile à certaines données qui aurait permis « de remplir plus efficacement leur mission. »Malgré une bonne volonté criante des collectivités, dans la Smart City notamment, le cadre juridique très strict a altéré leur champ d’action.


Les rédacteurs du rapport proposent alors une plus grande communication des données entre les acteurs en charge de la gestion des crises sanitaires. En France, cela signifie par exemple que les données pourraient être mutualisées entre Santé publique France et les différentes collectivités territoriales.


Le rapport souligne également que « les collectivités locales ont joué un rôle important auprès des personnes vulnérables » au travers d’actions concrètes comme la distribution de masques, les larges diffusions d’informations individuelles ou encore les visites à domicile pour assurer le lien social avec les personnes les plus isolées. « Toutefois, les communes n’ont pas pu s’appuyer sur un fichier fiable et exhaustif des coordonnées de leurs administrés, le législateur n’ayant pas créé de tel 'fichier de population' au bénéfice de celles-ci, comme l'a rappelé la Cnil »**.


Nuance dans les propos cependant, alors que le sénateurs soulignent la bonne volonté de la Cnil qui a su assouplir son cadre en autorisant le partage de différents fichiers comme celui de la taxe d’habitation, de la communication municipale ou encore les registres d’information et d’alerte des populations et les fichiers des inscriptions scolaires. « Il reste qu’il s’agit là d’outils partiels, incomplets, et qui n’ont pas été prévus pour cela » se désolent les auteurs du rapport.


Les différentes problématiques et situations ubuesques ne se seraient certainement pas présentées ces derniers mois si un identifiant unique avait été mis en place sur le territoire, cet identifiant « aurait permis, face à l’urgence, de communiquer les bonnes données aux bons acteurs et au bon moment, de façon sécurisée et comprise par la population ».


Enfin, les sénateurs proposent des expérimentations à l’échelle nationale ou locale en s’appuyant sur les outils numériques pour faire face aux crises sanitaires du futur : « de même que l’on peut imaginer des confinements ou des couvre-feux locaux, on peut imaginer des outils numériques déployés à l’échelle locale ». En déployant plus largement les outils numériques sur les territoires et en acceptant, sous un certain angle, qu’ils soient plus intrusifs sans altérer les libertés individuelles de chacun, ils offriraient même de nombreuses possibilités comme le soutien des personnes isolées, la mise en place d’une offre de mobilité adaptée ou encore la définition des besoins des acteurs économiques et/ou culturels d’un territoire.


Pour vous, les préconisations des sénateurs sont-elles applicables dans la Smart City ? Pensez-vous que la généralisation des outils numériques est la clé d’une meilleure gestion des crises sanitaires au niveau national et local ?

 


Sources :

  • *senat.fr/rap/r20-673/r20-673.html
  • **"COVID-19 : les traitements de données associés aux opérations de distribution de masques"-1er mai 2020
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